Togo : aggravation de l’état de santé du défenseur des droits de l’homme Abdoul Aziz Goma durant sa détention arbitraire (communication conjointe)

Ce qui suit est basé sur une communication écrite par la Rapporteuse spéciale sur la situation des défenseurs et défenseuses des droits humains et d’autres experts des Nations Unies et transmise au gouvernement du Togo le 15 janvier 2024. La communication est restée confidentielle durant 60 jours afin de permettre au Gouvernement de répondre. Malheureusement, le Gouvernement n’a pas répondu dans ce délai. Si une réponse est reçue, elle sera publiée dans la base de données des procédures spéciales des Nations Unies.

Depuis l’envoi de la communication, le juge d’instruction a retenu l’ensemble des charges à l’encontre d’Abdoul Aziz Goma. Il est désormais en mesure d’être jugé.

Ce qui suit est une version écourtée de la communication originale.

Lire la communication complète

CONTEXTE

Sujet : l’aggravation de l’état de santé du défenseur des droits de l’homme M. Abdoul Aziz Goma durant sa détention arbitraire.

M. Abdoul Aziz Goma est défenseur des droits de l’homme, âgé de 50 ans, irlandais d’origine togolaise. Il habitait en Irlande et effectuait des visites d’affaires régulièrement au Togo. Il avait financé les frais de logement de jeunes manifestants venus à Lomé pour participer à des manifestations pacifiques.

Cette lettre fait suite à une communication précédente envoyée au gouvernement togolais en décembre 2021, faisant état de la détention arbitraire et prolongée de M. Goma, durant laquelle il aurait été soumis à des actes de torture. Il n’a pas eu accès à un avocat entre décembre 2018 et octobre 2020 et sa santé s’est gravement détériorée.

ALLÉGATIONS

M. Abdoul Aziz Goma a été arrêté le 21 décembre 2018 après avoir pris en charge les frais de logement de certains jeunes venus dans la capitale Lomé pour participer à une manifestation convoquée par le parti politique d’opposition, le Parti National Panafricain (PNP), à laquelle il n’a, lui-même, pas participé.

Le 31 décembre 2018, M. Goma aurait comparu devant le Procureur de la République et aurait été informé des accusations portées contre lui, à savoir : de destruction volontaire de biens publics, d’association avec l’activisme et le radicalisme, d’association avec un groupe criminel, et d’atteinte à la sûreté et à la sécurité de l’État.

Le 6 août 2021, et en l’absence de ses avocats, le juge d’instruction a informé M. Goma que deux chefs d’accusation à son encontre, ceux de ‘destruction de biens publics’ et ‘d’atteinte à la sûreté de l’Etat,’ ont étaient abandonnés. Cette annonce aurait été faite en chambre privée, sans la présence des avocats de M. Goma, qui n’auraient pas été avisés de l’abandon de ces accusations par la suite. En cas de condamnation des accusations d’association avec l’activisme et le radicalisme, et d’association avec un groupe criminel, la peine maximale serait de dix ans de prison.

M. Goma est toujours en détention provisoire dans la prison civile de Lomé. Depuis son incarcération, l’état de santé de M. Goma s’est dégradé, notamment en raison d’une pathologie neurologique sévère avec des douleurs intenses qui perdurent depuis.

Le 26 novembre 2021, M. Goma aurait été admis à l’hôpital suite à une douleur nerveuse intense qui aurait été provoquée par une hernie discale et une sciatique. Les actes de torture auxquels il aurait été soumis lui auraient causé des douleurs musculaires, vertébrales, abdominales et articulaires permanentes. Selon un certain nombre de tests, dont une électroneuromyographie, M. Goma pourrait souffrir de la maladie de Charcot Marie Tooth, ce qui nécessiterait une intervention chirurgicale et une physiothérapie, afin que ces maux ne deviennent pas permanents. Cependant, les autorités n’auraient pas permis son accès à des soins adaptés.

Le 24 février 2022, le Gouvernement aurait justifié l’arrestation de M. Goma sur la base des articles 48, 49, 495, 549, 663 et 695 du Code pénal.

Le 4 avril 2022, M. Goma aurait formulé une demande de libération provisoire pour des raisons de santé. Celle-ci aurait été rejetée le 12 avril 2022, et ce rejet lui aurait été communiqué oralement. La source note que les raisons de ce rejet n’ont pas été documentées.

Le 14 septembre 2022, M. Goma aurait demandé la possibilité de requérir de son médecin un certificat médical, nécessaire pour recevoir un traitement médical. Le 21 novembre 2022, la cour d’appel de Lomé aurait fait droit à sa demande. Néanmoins, l’administration pénitentiaire n’aurait pas permis à M. Goma de se rendre à son rendez-vous médical, en raison d’un problème de documentation. En outre, l’administration pénitentiaire aurait empêché M. Goma de se rendre à un rendez-vous avec son médecin le 5 décembre 2022, bien que M. Goma ait été en possession d’une lettre et d’un certificat médical.

Depuis 2023, le nouvel avocat de M. Goma a constaté qu’il n’y avait aucune trace du fait que les deux charges retenues contre lui avaient été abandonnées en août 2021. Le juge d’instruction, nouvellement nommé, n’avait aucune information sur cette évolution. L’avocat de M. Goma se concentre sur l’enregistrement officiel de la décision d’abandonner les deux charges.

Le 29 août 2023, le groupe de travail sur la détention arbitraire a adopté un avis concernant M. Goma (39/2023), concluant que sa détention est arbitraire, soulignant qu’aucun procès ne devrait avoir lieu, exprimant sa grave préoccupation quant à la détérioration de son état de santé, et demandant que M. Goma soit libéré et accordé le droit d’obtenir réparation.

Le 10 octobre 2023, un neurologue basé à Lomé a nouvellement conclu que M. Goma souffre très probablement de la maladie de Charcot Marie Tooth, et que celle-ci ne peut pas être prise en charge avec des analgésiques conventionnels et le Togo n’aurait pas la capacité de le prendre en charge en matière de diagnostic et de traitement. Le rapport médical a été transmis aux autorités togolaises et à la Cour de justice de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Il a également été envoyé au Conseil irlandais des investisseurs à l’étranger qui l’a transmis au Ministère des Affaires étrangères irlandais.

M. Goma a passé au moins cinq ans en détention provisoire, ce qui équivaut à la moitié de la peine maximale possible pour laquelle M. Goma peut être condamné. La loi togolaise stipule que tout prisonnier ayant purgé au moins la moitié de sa peine potentielle avant le début du procès peut automatiquement faire l’objet d’un réexamen de sa libération.

PRÉOCCUPATIONS

Dans cette communication, nous exprimons notre vive inquiétude quant aux allégations de mauvais traitements de M. Goma en détention arbitraire, y compris le manque d’accès à des soins de santé de qualité adaptés à son état de santé qui s’est gravement détérioré au cours des cinq ans de détention, au point ou son traitement n’est pas possible au Togo.

Par ailleurs, nous exprimons nos sérieuses préoccupations selon lesquelles la détention de M. Goma pourrait être liée à ses activités de défenseur des droits de l’homme.

Actions

Submit Information

Submit confidential information on a HRD at risk

Communications and Press Releases

How do communications and press releases work?

Contact Mary

Request a meeting with Mary or her team